Obésité et surpoids chez l’enfant : causes et conséquences psychosociales
L’obésité est une maladie neuro comportementale qui résulte de nombreux facteurs à la fois génétiques, comportementaux, psychologiques, sociaux et environnementaux, qui ont chacun leur importance. Nous allons ici nous focaliser sur les causes et les conséquences psychosociales de cette maladie chez les adolescents et les enfants, dont la prévalence a triplé en 20 ans, passant de 5,1% des enfants de 10 ans en 1980 à 16,3% en 2000.
Pour mieux traiter l'obésité infantile, il faut comprendre qu’il s’agit d’un problème de santé multifactoriel, et si on a beaucoup parlé des risques pour la santé physique associés à l'obésité infantile, la santé mentale des enfants obèses a plus récemment intéressée les chercheurs.
L’obésité, on le sait, a des conséquences sur la qualité de vie, le bien-être général, l’estime que l’on a de soi. Elle entraîne – ou fortifie – les troubles alimentaires, les troubles anxieux ou la dépression.
Bien souvent, des problèmes psychosociaux antérieurs vont de pair avec l'obésité, sa naissance ou son maintien, et doivent être dépistés et pris en compte dans l’examen clinique et le traitement d’un enfant ou un adolescent souffrant d’obésité.
Les facteurs psychosociaux de l’obésité chez l'adolescent
Les facteurs psychosociaux, en particulier au sein de la famille, jouent souvent un rôle important dans l'apparition et le maintien de l'obésité. Une fois installée, l’obésité acquiert une influence déterminante sur la santé tant physique que mentale de l’enfant.
Le contexte familial et le rôle des parents
Le rôle des parents est donc clé : ce sont eux qui donnent l’exemple et qui sont en mesure de fixer des limites, d’apporter un cadre. Mais ce rôle est aussi complexe ! En effet, selon une étude publiée dans la revue Pediatrics en 2007, les enfants poussés à exceller dans un sport peuvent finir par en avoir une aversion, et un cercle vicieux s’installe.
Selon une autre étude de l’Université du Minnesota publiée dans l’édition de novembre du Journal of Nutrition Education and Behavior, créer un environnement de vie sain à la maison, soutenir et encourager ses enfants et ses adolescents à des changements de comportement positifs – comme un régime alimentaire équilibré et la pratique d'exercice physique – apparaît plus efficace que de communiquer directement sur des questions liées au poids.
Mais quid des contextes familiaux difficiles ?
Modes de vie, attitudes parentales par rapport à l’alimentation de l’enfant et la façon dont on l’éduque, le fonctionnement de la famille et ses modalités d’attachement que ce soit de l’enfant aux parents ou des parents à l‘enfant peuvent être des facteurs de stress – un stress chronique et régulier – et influer sur la psychologie et le bien-être de l’enfant, et avoir des répercussions sur son comportement alimentaire.
Le stress chronique
L'association entre le stress au début de la vie et l'obésité et le surpoids à l'âge adulte est bien établie. Les principales sources de stress au début de la vie comprennent les expériences négatives de l'enfance (par exemple, la violence, un divorce...), la pauvreté, l'insécurité alimentaire... L’exposition précoce chronique et aiguë à des facteurs de stress influerait le cerveau de l’enfant, et modifierait la structure de certaines régions responsables – entre autres – de la régulation des émotions. Ces modifications auraient pour conséquence de promouvoir de mauvaises habitudes alimentaires favorisant l’obésité, de perturber le sommeil, entrainer une plus faible activité physique, augmentant de facto les risques de surpoids et d'obésité.
Manque de sommeil
Un sommeil insuffisant est un facteur connu de risque d’obésité. Le manque de sommeil est de plus en plus fréquent chez les enfants et des associations entre une courte durée de sommeil dans la petite enfance et l'obésité sont systématiquement trouvées. On en sait moins sur la période de la petite enfance et les résultats chez les adolescents sont disparates. Les habitudes de sommeil peuvent également contribuer au risque d'obésité.
Le niveau de vie
L’obésité chez les jeunes touche davantage les milieux populaires. Une étude de L’université de Londres a révélé que les enfants d'aujourd'hui issus de familles défavorisées courent un plus grand risque d'être en surpoids, par rapport à ceux issus de ménages plus aisés et à ceux nés dans les années 1940, 50 et 70. Ce constat est corroboré par des études récentes menées en Suède et au Royaume-Uni et qui montrent que le surpoids et l’obésité progressent plus rapidement dans les classes défavorisées que dans les classes plus aisées. Cela s’expliquerait – en partie – par le coût d’une alimentation plus saine.
A l’école : préjugés et intimidation
La grossophobie existe, dès le plus jeune âge. Jugements, moqueries, mise à l’écart, intimidation voire humiliation, les enfants en surpoids ou obèses ont plus de risques de les subir. Bien souvent, les parents ne sont pas forcément au courant : on assiste alors à un cercle vicieux où l’enfant va “manger ses émotions” pour pallier à ce qu’il subit.
Le rôle de la collectivité
L’augmentation du nombre de personnes souffrant d’obésité, notamment chez les jeunes, est un problème de santé majeur. La collectivité a donc un rôle à jouer : quelles sont les mesures mises en place par l'État pour contrer l'obésité ?
Le PNNS – Programme National Nutrition Santé – conseille pour lutter contre le surpoids et l'obésité des enfants de manger au moins 5 fruits ou/et légumes par jour, de limiter la consommation de produits gras ou/et sucrés et de pratiquer l'équivalent d'une heure d'activité physique quotidiennement.
Mais les industriels continuent de rivaliser d’ingéniosité pour “appâter” les enfants – et les parents – avec des produits ultra-transformés : marketing bien ficelé, packaging et prix attractifs...
Devant la progression de l’épidémie, certains départements conduisent des actions en matière de prévention et d’amélioration des prises en charge des personnes obèses en proximité ou par des centres spécialisés comme le Centre Obésité Surpoids Grenoble.
Les conséquences psychosociales de l’obésité
Elles sont nombreuses et variées. Certaines étant à la fois des facteurs comme des conséquences.
L'impact de l'obésité sur la santé mentale est critique. En effet, l'obésité infantile peut entraîner des troubles du sommeil, de l'anxiété, de la dépression et une faible estime de soi. Certaines études montrent qu’être obèse pendant l'enfance était négativement associé à des comorbidités psychologiques, comme la dépression, une perception de qualité de vie faible, des troubles émotionnels et comportementaux. Les enfants obèses seraient plus susceptibles d'éprouver de multiples problèmes psychosociaux, lesquels sont aggravés par la stigmatisation et l'intimidation (à la fois causes et conséquences donc...) dont ils font l’objet.
Ces conséquences sont bien souvent à l’origine d’une souffrance psychologique importante sur laquelle l’enfant est parfois incapable de mettre le doigt.
Conclusion
Collaborer ensemble – patient, parents, médecins et professionnels de santé – est essentiel pour apporter des solutions qui fonctionnent et trouver une stratégie gagnante. Les enjeux psychosociaux liés à l’obésité infantile ne peuvent être ignorés et doivent être connus, compris. Pour les cliniciens, il s’agit d’avoir les bons outils, de travailler avec les parents et les enfants. Mais pour contrer l’obésité, les pouvoirs publics ont leur rôle à jouer et il est nécessaire d’élaborer des politiques publiques efficaces, sur l’offre alimentaire et son accès mais aussi sur la santé mentale axée et plus particulièrement sur les familles défavorisées sur le plan économique.
Sources
https://academic.oup.com/pch/article/17/4/207/2638889
https://jeatdisord.biomedcentral.com/articles/10.1186/2050-2974-1-7
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17545398/
“Stress in Early Life and Childhood Obesity Risk” Research Review, June 2017
Curr Opin Endocrinol Diabetes Obes. 2015 Feb; 22(1): 41–47.
https://institutdanone.org/objectif-nutrition/obesite-de-lenfant-role-d…